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Tour en France en Emmaüs par des jeunes de l'aumônerie de Cambrai

un projet de vacances dans la tête depuis 2 ans et bien travaillé depuis 6 mois, enfin concrétisé : partager la Vie avec les compagnons et d'autres jeunes

logocamp logocamp   Après 15 jours de travail et de vie avec les compagnons d’Emmaüs, notre regard sur des exclus de la société a changé. Ce camp nous a permis de vivre « avec » mais aussi « comme » eux, de vivre la rencontre jusqu’au bout dans le travail par exemple, mais aussi en prenant les repas avec eux.

Nous nous sommes rendus compte que ces hommes – et parfois même ces femmes  (puisque certaines communautés accueillent des femmes et des enfants) - n’étaient pas très différents de nous et que l’on a beaucoup appris rien qu’en discutant avec eux.

Ce camp est une expérience très enrichissante et emmaüs50ans emmaüs50ans   qui fait beaucoup réfléchir sur notre société où la consommation importe plus que le reste. Le fait de voir des camions remplis entièrement de vêtements ou de livre qui partent pour la récupération, cela nous fait réfléchir sur notre manière de nous de jeter parfois trop facilement.

La manière de vivre des compagnons dans les quatre communautés visitées était différente mais comparable à notre façon à nous, durant ce camp, de vivre en communauté. Même si cela n’est pas toujours évident, chacun en sort grandi et repart avec des idées pour changer certaines choses à notre niveau.

denis denis   Les rencontres n’ont pas toujours été faciles mais, à chaque fois, elles étaient fortes et constructives à la fois pour les jeunes et pour les compagnons.

Le camp a donné l’envie à certains jeunes de passer une partie de leurs prochaines vacances en tant que bénévoles dans une communauté pour continuer la rencontre.

Merci à tous les gens qui ont participé à la réalisation de ce projet d’une manière ou d’une autre.

Jérémy

 

 

ensemblejeuncompagnons ensemblejeuncompagnons   Bon, c’était pas gagné au départ, le projet ! Allier vacances, détente, dépaysement, avec la rencontre des compagnons et des communautés Emmaüs. Pourtant, les jeunes s’étaient préparés et ce sont eux qui sont à l’initiative : les jeunes ont l’habitude de passer deux jours à vivre et travailler avec les compagnons de la communauté Emmaüs de Fontaine Notre Dame, près de Cambrai ; ils ont ainsi des liens forts avec les compagnons. Ils avaient envie de voir d’autres communautés et de comprendre l’état d’esprit.

Ce qu’ils disaient avant de partir :

« On aimerait savoir ce que les compagnons vivent ça et là. Vivre une expérience inédite et peu connue des autres jeunes. Les compagnons ont vécu plus la misère par rapport à nous ; on aimerait comprendre comment on peut vivre malgré la misère, avoir un autre point de vue que ce qu’on nous montre à la TV, avoir plus conscience des réalités.

Les compagnons, malgré leur misère, ne vivent pas que pour eux ; par leur action, ils aident d’autres pays. On aimerait apprendre d’eux la générosité. Apprendre que dans la vie on ne peut pas tout avoir sans rien donner.

Ça fait 50 ans que ça existe : on aimerait comprendre et savoir comment ça tient et pourquoi .

On comprend que vivre, c’est aider et être aidé. »

« le fait de vivre avec les compagnons, de travailler avec eux, forcément, ça nous touche nous-mêmes, y compris entre jeunes : il faudra vivre l’entraide, la solidarité, l’écoute, s’épauler…Ce serait bien de travailler par petits groupes avec les compagnons, pour montrer que c’est l’aumônerie ensemble qui a ce projet et pas quelques uns ; et pour nous aider aussi, parce que ce n’est pas toujours évident de travailler avec quelqu’un qui a vécu la galère. »

« A chaque fois qu’on a fait l’expérience de Fontaine Notre Dame, à chaque fois, ça nous a amené pleins de questions sur la société, sur les fragilités, sur nous-mêmes.. »

« On aimerait recevoir un goût en Vie en plus au retour »

 

brouette brouette   D’où le choix de passer et de rester dans quelques communautés Emmaüs : partager quelques petits travaux avec les compagnons dans les communautés où nous resterions plusieurs jours : c’est par le travail qu’on reconnaît l’autre et qu’il y a ensuite des mots qui peuvent s’échanger ; et aussi de prendre le temps de relire ce qui a été vécu, les rencontres … et aussi se remotiver parfois …

 

En plus de Fontaine Notre Dame, quatre communautés ont été visitées : 5 jours à Redené, près de Quimperlé, 3 à Montauban, 2 à Toulouse et 3 à Dijon, avec les journées de transport, ça fait un beau périple.

 

déplacer des meubles déplacer des meubles   Le travail à Emmaüs, ce n’est pas le bagne, mais quand on a entre 14 et 18 ans, il peut paraître un peu répétitif et démoralisant. Alors, il a fallu apprendre à tenir dans la durée : « moi, je suis venue pour partager des moments de vie avec les compagnons ; comme leur vie est centrée sur leur travail, je suis venue aussi pour partager leur travail » ; « bon, c’est vrai, trier des

vêtements, ce n’est pas le plus marrant ; ou classer les meubles, enlever les meubles trop pourris, ou remplir une benne de métaux en plein soleil, ce n’est pas très amusant ; mais c’est ce qu’ils font jour après jour…Et c’est comme ça qu’ils peuvent vivre et s’en sortir. »

un travail a tout casser un travail a tout casser   « Ce que je préfère, ce sont les jours de vente ; mais pour les compagnons aussi, parce qu’ils s’habillent bien pour recevoir les visiteurs. C’est valorisant de voir les personnes de l’extérieur s’intéresser à ce qui a été travaillé ; il faut voir courir les personnes pour avoir en premier les beaux meubles ou bibelots mis en valeur ou tout nouvellement reçus; c'est dingue !»

 

 

Le coup de barre est là, alors on a la tentation de se reposer ; et puis ce sont les mots q’un responsable de communauté qui passent par là : « vous voyez, si vous restez là, à vous isoler, eh bien c’est comme si vous disiez aux compagnons que vous ne vous intéressez pas à eux ; le mieux, c’est de rester, même en ralentissant très fort le rythme et de discuter avec eux… »

 

Une fois une première frontière franchie, celle de la peur de part et d’autre, les échanges sont fructueux : « tu te rends compte, il m’a dit pourquoi il était à Emmaüs… » La confiance naît du fait de faire des choses ensemble, un peu comme le dit l’Abbé Pierre, là avec ces mots écrits dans un des réfectoires : « l’amitié, c’est faire ensemble des choses belles et difficiles, pour la vie, dans le temps ». Et on apprend que B. est venu là pour guérir de l’alcool, après une cure de désintoxication, et qu’il passe deux mois pour garder espoir : « il faut que vous prier pour moi … » ; un autre D. d’à peine 17 ans vit dans cette communauté avec sa jeune copine et son enfant, vient de Tchékie, manie bien le français, a envie de travailler, de s’en sortir mais veut rester libre. Tel autre nous raconte qu’une épreuve, une fragilité a bouleversé son existence et qu’ au lieu ou après la rue, il a décidé de reprendre goût de vie et dignité en venant à Emmaüs ; pourtant son existence ressemblait à la nôtre…

 

jean yves de Toulouse jean yves de Toulouse     « Emmaüs, c’est un sacré pari à notre société. Attention, la société, c’est nous, c’est toi, moi ; mais quand tu te rends compte que pour qu’elle puisse tourner, la société peut se passer des 5 millions de personnes en grande précarité, c’est fou ! actuellement, on dit à 5 millions de personnes, on n’a pas besoin de vous… Et nous, ici, et bien on arrive à vivre mais aussi à aider des ateliers et d’autres communautés à l’étranger à vivre, et cela rien qu’avec des déchets et des personnes exclues d’un certain système » dit Jean-Yves, un des responsables rencontrés.

la fameuse benne à métaux à 40 à l'ombre la fameuse benne à métaux à 40 à l'ombre   « Il y a dix ans, ici, c’était la boue, les personnes dormaient dans les caravanes ; là maintenant, chacun a sa chambre ; la communauté est construite comme un village. Et c’est important que des jeunes comme vous ou des personnes de l’extérieur, des amis, viennent, partagent avec nous : ça montre que ce qui se vit, c’est important ! » dit Christelle, une autre responsable.

« Nous, on privilégie l’accueil ; c’est l’accueil qui est important ; on ne se rend pas compte à quel point il y a des personnes à la rue ou en difficulté dans notre région ; alors oui, notre communauté elle est fragile et elle accueille du monde, avec des choix fait pour qu’on puisse accueillir toute personne ; on réfléchit au logement, mais ce sera encore deux par chambre… Et notre but, c’est que les personnes arrivent à s’en sortir, à retrouver une place en dehors. » C'est un troisième responsable qui parle.

 

accueil à Fontaine ND accueil à Fontaine ND   Toutes ces rencontres, forcément, ça touche le cœur de chacun des jeunes et animateurs, mais aussi de la vie du groupe. «  Les personnes arrivent blessées ; il faut parfois du temps pour communiquer, dialoguer avec elles ; il faut aussi que les demandes d’aide viennent de ces personnes elles-mêmes, sinon, on  peut se tromper de soutien. » « Parfois, au bout d’un certain temps, une personne va partir pour une simple dispute ou une simple impression ; mais c’est souvent un prétexte, parce que la personne après s’être reconstruite, s’être habituée à son travail, commence à réfléchir et à faire le point sur sa vie ; et c’est parfois trop difficile, même s’il y a une assistante sociale ou le responsable ou l’adjoint ou d’autres équipes prêtes à écouter… » « ça parle vrai, même si parfois c’est dur et franc ; ce qui peut gâcher le plus la vie de communauté, ce sont les murmures… »

Et il faut arriver à voir, regarder l’autre, le jeune ou le compagnon, au delà des apparences, du diplôme, de sa façon de parler…

des compagnons de Redené des compagnons de Redené   Alors on a essayé, avec des débats, des échanges, des questions posées à vivre ce sur quoi les communautés nous interpellaient : « ta fragilité et celle de l’autre, c’est un poids, une force, une occasion de vivre ensemble ? », « qu’est-ce que tu inventes pour t’adapter à l’autre ? », « tes fuites, c’est à cause des autres ou ce sont des fuites de ce que tu es ? » , « comment tu parles en face de l’autre ? », « comment tu fais corps avec une décision ou un projet ? », « comment tu recycles ce qui paraît le plus foutu de ton existence ? »

Au fait, c’était quoi le projet ? allier vie avec les compagnons, avec la vacance de faux-semblants et de superficialité, la détente des relations pour mieux rencontrer l’autre, le dépaysement de son univers vers un autre horizon…

« on aimerait repartir avec un goût de vie en plus… »

« on peut refaire le monde… » dit la devise d’Emmaüs. A commencer par en soi, autour de soi !

groupe groupe  

Article publié par aep cambrai • Publié le Vendredi 06 août 2004 - 13h24 • 6169 visites

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